Circonstances aggravantes
À l’invitation de Pierre Schoentjes et de l’École des Hautes Études de Gand, j’ai eu la joie de prononcer cette conférence le 10 octobre 2019. Dans le sillage de l’article que Pierre Schoentjes avait écrit sur mon premier roman, Les fils conducteurs (Verticales, 2017 ; Folio, 2019) pour la revue Critique, nous nous sommes rencontrés et avons échangé sur les questions liant la littérature et l’environnement, objet d’étude auquel Pierre Schoentjes a consacré une part importante de son travail de recherche. Se proposant d’explorer les ressorts de ma courte expérience de l’écriture (dramatique et romanesque) et tentant de mettre ce geste en perspective avec l’époque que nous vivons – la conférence a été écrite un an avant l’apparition de la pandémie de COVID-19 –, ce texte amorce un dialogue que nous avons eu la chance, avec Pierre Schoentjes, de poursuivre en décembre 2020 à l’occasion de la semaine des droits humains lors d’une rencontre virtuelle consultable en parallèle de ce texte.
C’est la première fois que je me risque à l’exercice de la conférence, ne sachant, outre comment on s’y prend, ce qu’est vraiment la conférence, quelles règles président à sa réussite, ne serait-ce déjà, soyons modestes, quel intérêt elle peut revêtir s’agissant d’une parole d’écrivain, puisque, je rejoins en cela nombre de camarades auteurs, et parmi les plus illustres, ne soyons pas si modestes, je crois en effet qu’un écrivain ne sait pas lire ses textes, a fortiori en dire plus ou mieux que ses lecteurs, quand il possède la chance d’en compter quelques-uns, et qu’il a toujours beaucoup à perdre en tentant de commenter son geste. Mais je ne souhaite nullement me dérober.
Je pense spontanément à la pièce de Christophe Pellet, dramaturge et cinéaste français avec qui j’ai eu la joie de traduire la dernière pièce de Martin Crimp, Christophe Pellet, donc, qui, dans son texte intitulé La Conférence comprend, au terme d’une brillante diatribe contre l’esprit Français et ses institutions culturelles, que son idéalisme d’écrivain ne sauvera pas le monde et que l’option du suicide devient la seule position existentielle valable. Sans aller jusqu’à cette extrémité – je me souhaite meilleure péroraison –, voilà un peu la nature de ma panique au moment de partager avec vous quelques réflexions.
Le titre même de cette prise de parole me laisse pantois. J’ai choisi, non sans désinvolture, cette expression juridique circonstances aggravantes au moment où j’étais en train d’écrire ce qui ne sera pas mon deuxième roman. Ce manuscrit, délicatement refusé par mes éditeurs, s’est mis, au contact des premiers lecteurs, pour ainsi dire à fuiter, à perdre son sens et son intérêt comme une bouillotte de caoutchouc qu’on aurait malencontreusement percée et qui se serait vidée de l’eau qui lui donnait sa forme d’estomac trop plein. Le baptême de cette prise de parole reste donc associé, dans le cours des derniers mois, à une sorte de cuisant échec dont je ne trouve pas encore le sens, pour lequel je ne me sens prêt à entreprendre aucune revanche et qui n’a eu pour effet immédiat que de rendre l’acte d’écriture plus dévalorisant que jamais. Les circonstances aggravantes que je pensais détailler en marge d’un processus d’écriture qui n’a plus lieu d’être, son réceptacle ayant été remis aux limbes – pour me consoler de l’année et demie passée à lamentablement rater un texte, je me raconte parfois qu’il ressuscitera dans trente ans, ce manuscrit, si je suis toujours de ce monde, sous une forme géniale, rachetant ainsi l’humiliation primitive qui a accompagné sa naissance, pour l’heure avortée – les circonstances, donc, dites aggravantes dont j’entendais dresser la typologie et cerner la nature avaient trait à la position singulière qu’espère tenir l’écrivain en se retirant pour mieux s’impliquer, en embrassant pour mieux étreindre, en imaginant pour mieux vérifier – bref, toute une litanie de poncifs : comme quoi à quelque chose malheur est bon, le ratage du deuxième roman vous aura peut-être épargnés. Si j’envisageais de parler de cela, c’est parce qu’à l’occasion de la parution de mon premier et pour l’heure seul roman[1], Les fils conducteurs publié aux éditions Verticales en 2017, j’ai beaucoup eu à justifier et défendre ma place d’affabulateur. Je suis d’un tempérament versatile, aussi je viens de changer d’idée. Je vais en fait m’attarder quelques instants sur ce contexte, après tout j’ai passé un an et demie à rater un manuscrit, il faut bien que je convertisse ce fiasco en quelques paroles qui je l’espère ne seront ni aussi confondantes ni aussi sottes que le titre de cette conférence, dont on aura, à ce stade, compris je crois qu’elle s’apparente tout entière à une débâcle, ne pourrait le laisser supposer.
Les fils conducteurs raconte le quotidien de trois adolescents oeuvrant dans la décharge électronique d’Agbogbloshie, au Ghana, territoire cauchemardesque où échoue la majeure partie de nos outils numériques, lesquels sont triés et dépecés par un peuple de travailleurs pour la plupart mineurs, s’exposant, par leurs méthodes de tri à des risques sanitaires, eux, majeurs – ce qu’exprime, en des termes proches, le personnage de Thomas à la fin du livre en des circonstances d’ailleurs bel et bien aggravantes. J’ai découvert l’existence de ce lieu en novembre 2013 à Stockholm, lors d’une exposition photographique intitulée Permanent Error, signée par le photographe sud-africain Pieter Hugo. La documentation que j’ai mobilisée a donc compris cette série photographique dont je me suis largement inspiré pour architecturer ce que les personnages nomment, dans le roman, « la bosse ». J’ai également consulté nombre de reportages audiovisuels, radiophoniques et journalistiques pour approcher ce territoire réel. En somme, hormis Stockholm où j’ai éprouvé, de manière cinglante, ma condition d’européen nanti, appartenant à la génération easy-jet, capable donc de rejoindre les capitales les plus cosmopolites en quelques heures de vol bon marché le temps d’un week-end destiné à conforter cette même identité dite ouverte, curieuse, dynamique et progressiste – ce que peut-être nous nommerions aujourd’hui simplement sous le néologisme de macroniste avant l’heure – hormis donc cette translation aérienne au bilan carbone tout à fait désastreux car loin d’être sporadique : le jeune européen que j’étais il y a six ans avait déjà pas mal pollué par ses voyages et n’entendait pas s’arrêter là, mais, je peux en attester, c’est pourtant ce qu’il fit, s’en tenir là, compte tenu de l’effet qu’eut sur lui l’exposition vue au Fotografiska – comme quoi l’art, s’il ne sert à rien, peut tout changer, à commencer par des convictions politiques – hormis, je vais terminer cette phrase scandaleusement sinueuse vouée à dire l’embarras que j’éprouve à me considérer tel que je fus, c’est-à-dire non encore conscient de l’apocalypse climatique, hormis la capitale suédoise, je n’ai pas quitté mon bureau pour écrire Les fils conducteurs. Et cet immobilisme, d’autres diraient ce sédentarisme, m’a valu quelques attaques, ou plutôt, ne dramatisons pas, quelques incompréhensions.
Trois Photos de l’exposition Permanent Error © Pieter Hugo
(cliquer sur la flèche à droite de l’image pour faire défiler les photos)
Je me souviens en particulier d’un lecteur venu assister à l’une des rencontres en librairie à laquelle j’ai pu participer au moment de la parution du livre. C’était un homme d’une soixantaine d’années environ, grand et sec, homme à lunettes au visage acéré, attentif et impitoyable. Je peux très nettement le décrire car il n’y avait pas foule. Sans doute aussi, trêve de plaisanterie pourtant tout à fait fidèle au contexte de fréquentation ce jour-là, et tous les autres d’ailleurs, sans doute ai-je gravé dans ma mémoire sa physionomie en raison de ce qu’il vint me dire à la fin de la rencontre. Celle-ci s’était déroulée d’une manière sensiblement identique aux rencontres qui l’avaient précédée. Après avoir « pitché » – j’utilise à dessein ce terme, car peut-être dirai-je quelques mots, si j’ai le temps, d’un séminaire désastreux auquel j’ai participé à Londres en avril 2018, qui réunissait des dramaturges européens dits émergents, et dont l’unique but était de nous sensibiliser à « l’art du pitch » – je mime également les guillemets puisque ce geste est de rigueur dans ce genre de « workshops » et plus généralement dans l’univers anglo-saxon – nous sensibiliser, donc, à « l’art du pitch » afin de nous extraire de notre condition d’écrivain ringard, dépassé, inutilement complexe et complexé, bref : des rebuts, peut-être en dirai-je donc quelques mots car l’expérience est révélatrice, me semble-t-il de ce que je tente, à grands renforts de digressions, de verbaliser ici – après avoir « pitché », donc la trame du roman, à quoi d’inévitables soupirs de lassitude ou interjections désapprobatrices répondaient, semblant réprouver la nature apparemment sordide, complaisante donc, du projet, le libraire me demandait si j’étais allé sur place pour enquêter et nourrir la fiction de mon roman. Ma réponse a toujours été nette et inconsciemment honnête : non. Je n’y suis pas allé. Qu’y aurais-je fait ? ajoutai-je souvent. Pour étayer ma défense et tenter de braver les regards suspects, dubitatifs ou plus vraisemblablement navrés – j’ai une petite tendance à la paranoïa, j’espère que ça ne se voit pas trop –, je me justifiais toujours de manière assez pataude, arguant du fait que je n’étais pas un reporter, que j’étais incapable d’enquêter sur le terrain, que ce n’était pas mon métier, et surtout pas ma conception de la littérature – je dégainais les grands mots face à l’hostilité croissante du groupe – groupuscule serait plus juste –, qu’un écrivain n’était pas un journaliste, pas même un témoin, qu’il n’avait rien d’autre à faire que se retirer, ne pas quitter son bureau sauf pour maintenir ses fonctions vitales, et écrire. Ceci étant dit, ceci qui n’était, je m’en aperçois, guère convaincant ni même guère juste, je répondais maladroitement aux autres questions, conscient que j’avais dévissé dans l’estime de chacune et chacun, que je peinerais à regagner non pas même la confiance de l’auditoire, mais du moins son attention neutre, que j’avais perdu toute crédibilité : comment pouvais-je prétendre décrire un monde sans le connaître de première main ? Il m’aurait fallu expliquer que la seconde main, pour reprendre le titre d’un ouvrage d’Antoine Compagnon, la seconde main, en plus d’être justement l’un des titres envisagés pour le roman, était précisément le motif du texte et que, la récup’ ou le recyclage avait constitué le protocole même de l’écriture lorsque j’avais entrepris d’inventer une langue pour faire parler les travailleurs de la décharge. Mais je restai muet, j’encaissai, j’assumai – je me drapai dans ma susceptibilité. À la fin de l’échange en question, survint donc l’homme grand et sec, qui s’était tu jusque-là et qui me lâcha avec un aplomb que je lui envie : « J’ai adoré votre roman, mais maintenant que je sais que vous n’êtes pas allé sur place, je suis déçu et je crois que je ne l’aime plus. »
Sonné. Troublé par le compliment aussitôt retiré, charmé par la franchise du propos, impressionné par la profondeur du sous-texte qu’immédiatement j’ai identifié comme un verdict résolument contemporain : voilà ce qui est aujourd’hui exigé de la littérature, qu’elle atteste, qu’elle documente, qu’elle dise, pour de vrai, ce qui est, qu’elle soit, en somme, une science. Il est probable que les concepts que j’utilise pour me frayer un chemin entre les brumes de l’écriture soient improprement maniés, je m’en excuse – et persévère ou persiste selon le crédit que vous me donnerez à ce stade de ladite conférence. La littérature doit aujourd’hui prouver. On ne lui accorde nullement le bénéfice du doute. Elle doit rendre compte d’un fait éprouvé par celui qui le raconte ; il n’est pas acceptable, pour des raisons qui m’échappent, et dont j’espère qu’elles sont tout sauf morales, qu’un écrivain se permette de dire un monde qu’il ne connaît pas, qu’il n’a pas visité, dont il ne détient pas l’expérience intime et au sujet duquel il ne saurait donc être un expert légitime. Au risque de paraître très nouveau-roman, je crois pouvoir affirmer qu’à mon sens l’écriture est une expérience avant d’être un récit qui la raconte. Mais si j’y crois absolument, je conçois aussi qu’on demande des comptes à ceux qui écrivent, j’y reviendrai.
Le problème, c’est peut-être que celui ou celle qui écrit s’en demande inlassablement, des comptes. Je ne veux pas ici dresser l’inventaire des états-d’âme qui peuvent traverser celui ou celle qui s’adonne à l’acte d’écrire, ni tenir un journal d’écriture se vautrant dans les vicissitudes du geste. Non pas tellement parce que je suis animé d’une précaution altruiste et que je souhaite vous épargner un mauvais catalogue d’aphorismes plus ou moins bien sentis, plus ou moins sentimentaux, mais plutôt parce qu’il n’y a pas grand-chose à dire de l’acte en lui-même ; il n’a rien de spectaculaire. Quand on écrit, il ne se passe rien. Rien de visible en tout cas, rien d’extérieur. Il faudrait introduire une caméra dans les entrailles pour peut-être y déceler quelque menus ravages. C’est tristement ennuyeux, d’écrire – il pleut des cordes en ce moment à Paris au moment où je rédige ces lignes – ça n’a rien de trépidant, rien de vibrant, rien de décisif. C’est même assez pénible. Je ne me considère pas encore comme quelqu’un dont la vie serait passée, qui aurait derrière lui une majorité de bonnes années, je les crois devant moi comme nous tous au fond, quel que soit notre âge – ce décompte abstrait qui sert à l’état civil mais nous trompe et nous illusionne (ma mère est morte à l’âge de cinquante-quatre ans, aussi les termes longévité, espérance de vie, maturité ou expérience me semblent pour le moins dénués de sens dans une société qui se rêve centenaire) – je ne me considère pas, donc, comme un éminent spécialiste de cette activité, oserais-je dire comme un expert légitimé à parler de ce qu’est ou n’est pas l’écriture, mais depuis huit ans que j’écris, disons, activement, je ne vois pas tellement de progrès, écrire est pour moi toujours aussi inconfortable et électrisant – l’inconfort est physique, l’excitation dépréciative car elle se canalise mal, se convertit vite en tétanie, ces deux modalités, inconfort et excitation, virant régulièrement au désoeuvrement. Pour autant, je n’envisage pas une seule seconde de ne pas écrire. On me dira certainement que mes remarques sont, au mieux, empreintes d’une austérité exagérée, au pire, d’une prétention indue : qui suis-je ou plus précisément qu’ai-je écrit pour parler en ces termes de l’acte sacré ? Un seul roman, c’est peu, et j’en conviens absolument, c’est même aujourd’hui mon inquiétude principale. Voulant tempérer la critique, je pourrais, faire état des diverses pièces de théâtre que j’ai tenté d’écrire et qui, ayant connu des fortunes diverses, se sont jouées, seulement voilà : la littérature d’aujourd’hui ne considère plus le théâtre comme une forme qu’elle pourrait inclure dans son champ strict. Les plus grands éditeurs ont renoncé à en publier – de rares accidents émaillent leur catalogue, quand un prix Nobel se pique d’une fantaisie théâtrale ou qu’un romancier coutumier des best-sellers s’essaie à la comédie comme on s’offrait jadis une folie sur la Côte d’Azur. La littérature théâtrale a regagné les marges parce qu’elle ne compte plus au sein de l’industrie éditoriale. Le « marché du livre » exclut de ses courbes toujours plus déclinantes les quelques exemplaires de théâtre contemporain que d’improbables illuminés continuent de défendre et d’éditer. Passez donc votre chemin, et surtout : écrivez un deuxième roman, puis un troisième, et alors : on verra.
Je voyage dans les couloirs de cette conférence à sauts et à gambades, et j’en suis désolé, j’ai l’esprit d’escalier. Je ne parviens pas à faire de plan clair, et quand je tente d’en tracer un, je peine à le suivre et dois bien confesser que je m’ennuie en tentant d’y coller fidèlement. C’est d’ailleurs la même chose quand j’écris – quand je tente d’écrire – je ne réussis pas à respecter un plan qui préexisterait au temps effectif de l’écriture, un plan que je pourrais a priori concevoir fort de mes savoirs, de mes projections ou de mes désirs. C’est en écrivant que quelque chose s’agence. J’accumule des bribes et celles-ci se classent, s’agglomèrent ou s’excluent. Alors, une fois déployé devant moi un ensemble de passages, je tente de les monter et de les conduire. Je m’étais mentalement raconté que je vous parlerais de ceci et cela selon telle progression logique et subtilement dramatisée, me voici perdu dans un labyrinthe d’impulsions que je ne maîtrise pas. Au moment de taper ces paragraphes – je trouve à ce propos le mot taper d’une justesse confondante quand il s’agit d’écriture, car pour ma part, je n’écris pas sur du papier, mais sur un clavier, il n’y a pas de geste préparatoire au crayon, sur un carnet : la surface digitale elle seule est mon instrument, et je me rends compte, en le disant, qu’au fond ce que je cherche c’est peut-être moins écrire que taper, cogner, violenter, que la percussion à laquelle je m’adonne volontiers imprime sa nervosité, sa cadence saccadée, sa rythmique pointilliste à ce que j’écris, si bien que la sensation de scandale qui est souvent à l’origine d’une pièce ou d’un roman épouse avec harmonie l’activité physique de la frappe : puisqu’écrire demande de taper ou frapper, il paraît naturel que l’écriture telle que je la pratique réponde à l’indignation et entraîne l’affrontement. Je sais que je vais aller au conflit avec mon sujet d’écriture puisque je vais passer de longs mois à le taper. Je n’ai pas encore réussi à écrire sur un carnet : chaque fois que j’ai tenté de le faire, j’ai voulu bien écrire, c’est-à-dire que j’ai voulu être élégant, lisible comme lorsque je rendais des copies au collège et au lycée, j’ai donc été neutralisé par ma propre graphie, soucieux de mes arabesques, écrivant de très mauvaises lignes. La mise en forme offerte par le traitement de texte m’épargne un souci majeur : la joliesse. Au moment, donc, ce taper ces paragraphes, je prends conscience d’une chose fondamentale : je ne sais pas ce que j’ai à dire. Je ne peux l’entrevoir que dans la phrase, au moment où je tente de la construire, quand je suis dedans et qu’elle expulse mes intentions, qu’elle rejette mes projets pour elle, qu’elle révoque mes visées. À l’origine, quelque chose en moi livre un verdict, une sorte d’intuition que je me propose de mettre en forme. Mais à mesure que je tente de la cerner par le langage, c’est comme si je ne faisais que décrire une parabole jusqu’à elle, malmené le long d’une courbe qui ne souhaite pas retomber, qui n’a pas prévu d’arriver et qui, s’éloignant toujours plus de sa cible, donne pourtant de la perspective, de la profondeur – de la distance ; c’est comme si j’étais en mer, envisageant le point de lumière côtier qu’il me faut rejoindre, et que les vents, les manœuvres et les illusions d’optique m’éloignaient toujours plus de ce point que je ne quitte pourtant pas des yeux, comme si de la distance s’inventait entre moi et ce point, que l’espace soudainement se dilatait, que des milles surgissaient de nulle part avec pour seule fonction d’accroître l’espace-temps au sein duquel je m’insère – voilà ce qu’est l’écriture pour moi : un acte qui me distance. Au lieu de rester coi, drapé dans ma stupeur, j’aurais dû dire cela à l’homme qui m’a fait le cadeau de désaimer mon livre à présent qu’il en connaissait quelques secrets. N’écrivant pas pour dire ce que je sais mais pour tenter de mesurer l’ampleur de tout ce qui m’échappe, j’aurais dû lui rétorquer qu’un voyage à Agbogbloshie, redoublant celui de l’écriture, m’aurait confisqué l’acte lui-même ; que, me déplaçant jusqu’au territoire de la fiction, j’en aurais fait un souvenir ; que la mémoire est une invention ; et que comme l’imaginaire, elle est faillible, lacunaire ; que l’authenticité d’une expérience ne présage pas de la vérité d’une écriture – diverses publications, chaque année, peuvent, je le crois, attester cela. Les voilà, donc mes circonstances aggravantes : écrire hors de moi. Et c’est vrai, je l’ai avoué : je tape, je frappe, je suis bel et bien hors de moi.
Guillaume Poix
Il faut dire que cela m’arrange : je ne crois pas être en mesure de dire qui je suis, ni même ce que je suis. L’injonction identitaire qui est aujourd’hui faite à la littérature, et par extension, à ceux qui la produisent, ne me paraît pas être une bonne nouvelle. Ce qu’apparemment je suis, vous le voyez, je ne peux pas le dissimuler. Vous ne soupçonnez pas les souterrains, les guerres intérieures, les traumatismes et les chances : nous sommes toutes et tous de mystérieuses cartes aux tracés approximatifs et aux légendes arbitraires ; notre territoire est plus vaste, plus retors, plus changeant que ce que sa transposition schématique raconte. Heureusement, et c’est un lieu commun, les livres sont infiniment plus riches et intéressants que leurs auteurs – je parle des livres que le temps sauve et qui nous sauvent. Je me réjouis de savoir qu’un texte de Claude Simon dépasse l’homme qu’il fut, le contredit, le brouille, que ses dimensions d’homme de chair explosent littéralement pour embrasser ce qu’il a lui-même nommé la « splendide magnificence du monde ». Je me réjouis tout autant qu’un récit d’Annie Ernaux la distance et la révoque – à force de la rencontrer dans ses textes, elle m’est devenue étrangère, fragmentée, distribuée dans une infinité d’histoires dont il paraît qu’elle n’en font qu’une, brisée comme des tessons de mosaïques ou les éclats de verre qu’un kaléidoscope me donne à voir quand je l’actionne, ainsi cette femme, coulée dans ses livres comme du bronze en fusion, me brûle quand je la lis parce qu’elle est devenue le livre et, ce faisant, elle s’efface – je vous l’accorde ce sont deux cas extrêmes, mais ils me semblent dire quelque chose du rêve qu’un écrivain peut former : échapper aux assignations identitaires, déjouer les pronostics, se contredire et finalement : disparaître – disparaître derrière le cours du temps rendu sensible par de l’écriture. Claude Simon et Annie Ernaux ressassent dans leurs œuvres les événements qui ont pu faire ou former leur vie et pourtant je dois reconnaître que leur personne m’indiffère. Pour moi, ils ne sont plus nulle part dans leur livre à force d’y être. Et à force d’action sur la langue, ils inventent une syntaxe qui fait du seul mouvement de la vie l’objet même de l’écriture. On m’objectera que leur vie, respectivement, est précisément criblée d’événements – ceux-ci ont de quoi donner de la matière à l’écriture. Claude Simon a par exemple perdu son père dans les tranchées, sa mère est morte d’un cancer quand il était enfant, il a réchappé par miracle à ce qu’on nomme de manière tout à fait impropre la « drôle de guerre » au cours de laquelle son escadron fut décimé, sa première femme s’est suicidée. Assez pour une vie, pourrait-on dire. Quant à Annie Ernaux, tout ce qu’une femme endure, cette autre forme de guerre, permanente celle-là, qu’elle mène contre la domination patriarcale et l’injustice sociale induite par le capitalisme libéral, détermine l’acte d’écriture. Mais ces événements, s’ils emblématisent une vie, la réduisent-ils et conditionnent-ils le passage à l’acte d’écriture ? Combien d’êtres qui n’ont pas écrit ont vécu pire ? Quelle est cette échelle du pire ? Doit-on accorder des permis d’écrire selon les épreuves vécues par chacun ? J’ai parfois l’impression que la prolifération des récits d’expérience, se proclamant héritiers de l’œuvre d’Annie Ernaux, justement, quand ce n’en sont bien souvent que de fallacieux dévoiements prenant la forme d’un journal intime où l’impudeur le dispute à l’indigence, a conditionné les attentes et déformé l’éthique littéraire : seul le témoignage identitaire vaut désormais car il entretient en apparence un rapport clair avec la vérité, quand le roman trouble ce rapport. Qui suis-je alors, encore une fois, moi, pour écrire – qu’ai-je vécu qui soit digne de se hisser à la hauteur de toutes ces existences prises dans leur temps comme un fil conducteur dans sa gaine isolante, voilà la question qui peut dès lors poindre dans l’esprit d’un lecteur potentiel. Si je ne crains rien pour la littérature – ce ne sont après tout que de légers obstacles – je redoute en revanche que cette question s’ancre, s’impose durablement et se traduise en une vision politique majoritaire – nous n’en sommes pas loin – celle qui jauge et juge selon des critères identitaires. Celle qui postule que ce qu’on est détermine ce qu’on fait. Je crois, pour ce qui est de la littérature, que ce qu’on n’est ne détermine pas ce qu’on écrit, je crois même à l’inverse : ce qu’on écrit détermine ce qu’on est, parce que l’expérience de l’écriture, comme la vie, métamorphose. Mais s’il est probable que la passion identitaire appliquée à la littérature ne lui cause que des torts surmontables, j’ignore si nos sociétés auront cette résilience.
Et de la résilience, j’y reviens comme promis, il en aura fallu à la cohorte de dramaturges européens réunis à Londres par un organisme, européen lui aussi, dont la mission consiste à promouvoir les travaux d’auteurs de théâtre dits émergents – cette catégorie ne recoupant nullement une classe d’âge : de même que tout le monde peut cuisiner dirait Walt Disney, tout le monde peut émerger, diraient les animateurs de cette structure ouverte, curieuse, dynamique et progressiste – qu’au fond nous pourrions aujourd’hui simplement qualifier sous l’archaïsme de macroniste. Dans le sillage de cette injonction identitaire faite à celles et ceux qui écrivent, une autre forme de danger – exagérons un peu, mais après tout nous sommes à Londres – menace l’être imprudent qui se compromet dans cette forme éculée, obsolète et minoritaire qu’est l’écriture théâtrale. Après plusieurs séances de team-building destinée à renforcer la solidarité d’un groupe constitué d’écrivains italien, autrichien, tchèque, polonais, allemand, espagnol et françai, tous évidemment timides et mal à l’aise avec leurs corps, moi compris, après plusieurs heures passées à écouter tantôt les propos embarrassés d’un directeur de théâtre confessant qu’il n’y a tout simplement pas de public à Londres pour des pièces étrangères ce qui explique sans doute la part nulle de productions de textes étrangers au cours de sa saison, tantôt les circonvolutions d’une agente littéraire spécialisée dans la promotion des dramaturges étrangers ici à Londres ayant expliqué non sans défaitisme que c’était un dur métier et qu’on pouvait tout à fait lui envoyer nos textes à condition qu’ils soient déjà traduits, qu’ils ne consistent pas en des travaux, je cite, « expérimentaux, formalistes ou post-modernes », ni en des traversées, je cite, « trop éprouvantes sur des sujets lourds », ni en des flux de langues, je cite, « trop poétiques ou perchés », après avoir chacun expliqué que la part d’auteurs étrangers joués dans nos sociétés respectives consistait en une bonne moitié des productions chaque année – criant écart avec le Royaume-Uni – et après avoir dû dessiner sa carte de vie qu’il aura également fallu expliquer aux autres dans un volapuk approximatif, est arrivé Rikki. Rikki s’est présenté. Rikki est comédien, metteur en scène, auteur, producteur, scénographe, costumier, chorégraphe, danseur, chanteur, compositeur, maquilleur, perruquier, peintre, poète et professeur de yoga. Rikki est donc polyvalent. Vent d’admiration dans la salle, nous frémissons. Rikki est venu nous donner un atelier intitulé « Life is a pitch » – périlleux jeu de mots (ou scabreux, comme on voudra ou pourra, selon son niveau d’anglais). L’idée de cette séance évidemment interactive ou participative je ne sais plus, est, je vous le disais il y a quelques minutes, de nous sensibiliser à l’art du pitch, parce que comme son nom l’indique, la vie est un pitch, ou le pitch c’est la vie ou tout est pitch dans la vie – au choix et inversement – et aussi et surtout parce que pour vendre ses projets, trouver des producteurs, des financements, des soutiens – Rikki ne va bien entendu pas jusqu’à dire se vendre – il est nécessaire de savoir pitcher lesdits projets. Il convient de « capter, captiver, capturer ». Une petite voix en moi trouve cette adaptation des préceptes rhétoriques cicéroniens plutôt maladroite, jugeant que les termes latins, après tout, étaient assez clairs. Une autre voix en moi, celle qui a toujours détesté le latin, matière honnie qui m’a souvent valu des scores négatifs, se réjouit de cette actualisation et juge cette séance de tutorat instructive, quoique non encore édifiante. Au fil de l’exposé, qui se met d’ailleurs de plus en plus à ressembler à une défense et illustration de Rikki – plaidoyer pro domo (décidément, le latin) tire-larmes et vitaminé qui me capte – je comprends que je risque de ne pas m’accorder avec Rikki dont le lexique entrepreneurial décomplexé choque évidemment notre assemblée d’honorables gratte-papiers has never been prenant d’ailleurs docilement des notes sur des carnets gondolés tandis que Rikki balaye l’écran de son Ipad d’un doigté qui fait mouche pour nous montrer des graphiques et des schémas appuyant ses dires, quand ce ne sont pas des photos personnelles nous le présentant comme un être aussi vivant que n’importe qui (nous par exemple, même s’il a l’air d’en douter) – le voilà qui me captive. S’engage alors une discussion sur l’opportunité du pitch : je suis plutôt pour ma part encore assez conciliant avec Rikki, ayant constaté, pour en avoir réalisé plusieurs, que le nerf de la guerre d’un spectacle ce sont bien les producteurs – les théâtres, donc – et que les programmateurs aiment qu’on leur raconte une histoire (puisque c’est à ce concept, histoire, que renvoie en vérité le détonnant vocable pitch, dont je trouve que la référence, pour un public français, à cette fameuse marque de brioches au chocolat régulièrement dévorées pendant l’enfance en altère le souvenir) : il faut donc jouer le jeu du pitch devant celles et ceux qui vont permettre ou non à toute une équipe de montrer son travail dans un théâtre – question de survie tant qu’on ne s’appelle ni Wajdi Mouawad, ni Pascal Rambert, ni Joël Pommerat, qui eux, peuvent aisément s’en passer. Mais lorsque Rikki suggère que tout fonctionne comme ça, à commencer par l’acte d’écriture, je tique. Je tente d’avancer que je n’ai pas l’impression, en ce qui me concerne, que l’écriture passe par le tamis du pitch, elle aurait d’ailleurs plutôt tendance à le fuir. Mais Rikki renchérit : tu te pitches à toi-même ce que tu vas écrire, et alors seulement tu l’écris. Je nie, tentant d’expliquer que c’est l’inverse qui se passe : j’écris et alors quelque chose se raconte. Nous débattons vivement, il me coupe régulièrement la parole, je ne peux pas échapper au pitch, tout est pitch c’est ainsi, mon incapacité à pitcher mon texte est en soi un pitch, je suis pris au piège et perds bien entendu tous mes moyens – je rappelle à ce stade que je dois ferrailler dans la langue de Shakespeare, ce qui ajoute une difficulté et accroit les malentendus. Je finis l’échange dépité, je sens que je n’ai pas réussi à dire le fond de mes pensées – j’ai régulièrement cette impression, à commencer par maintenant, là, tout de suite. Sous ma bannière, certains des camarades dramaturges se sont ligués contre Rikki – l’autrichien et l’allemand – quand tous les autres, polonais, tchèque, italien et espagnol semblent partager les vues de Rikki, tous me considérant avec une forme de compassion dans le regard, comme on observe un nourrisson dont on sait qu’il ne parviendra pas à attraper tel objet ou réaliser telle action, immaturité motrice oblige. Une vive mélancolie me prend au retour du séminaire londonien : peut-être que je n’ai rien compris à l’écriture et peut-être que si je pitchais mes projets avant de les écrire, ça irait mieux pour moi. Quelques mois plus tard, j’écoute alors une émission consacrée à Claude Simon – encore lui. Je l’écoute expliquer (pitcher ?) que l’écriture est un artisanat à cette différence près que l’artisan sait avant de le réaliser l’objet qu’il se propose de façonner. L’écrivain, dit Simon, n’en a, pour sa part, pas la moindre idée. Ce qui se fait au fil de l’écriture, il ne peut pas l’anticiper et même, il ne doit pas l’anticiper. Et Simon de citer ces mots de Raoul Dufy : « Il faut savoir abandonner le tableau qu’on voulait faire au profit de celui qui se fait ».
S’il faut savoir abandonner la conférence qu’on voulait faire au profit de celle qui se fait, je vous présente toutefois mes excuses pour ce prototype « battant comme une porte », et qui, je le mesure cruellement, ne ressemble en rien à ce que j’aurais voulu être capable de dire. Je me croyais beaucoup plus attentif au fond qu’à la forme, beaucoup plus concerné par le sujet que par l’objet – voilà l’inconvénient d’écrire : on prend acte de ses impuissances, on se révèle tout autrement que l’on se croyait être, on mesure ce que le langage nous fait et, partant, ce que nous faisons de lui. Qui peut se fier aux écrivains qui vous promettent une chose et n’en font pas le quart ? La preuve : je voulais vous parler des sujets que j’aborde dans certains de mes textes : les viols correctifs en Afrique du Sud, la décharge électronique d’Agbogbloshie, l’œuvre de Vivian Maier, photographe de rue américaine dont on a retrouvé les somptueux clichés non développés après sa mort, ou Romy Schneider, pour laquelle je me suis passionné au moment d’écrire à son sujet une pièce de théâtre l’an dernier, cette femme iconique dont l’œuvre cinématographique me semble raconter un impensé de l’histoire européenne. Je voulais partager mes enquêtes, mes récits et tenter de vous prouver que l’écriture, loin d’une rétraction, me propulse dans le monde, qu’elle m’y ancre et m’y engage. Me voici parvenu au point de non-retour : cet instant implacable où je me confronte à ce que j’ai fait – vous êtes en droit de me demander des comptes. Thomas Blanguernon, dans La conférence, ce texte de Christophe Pellet dont j’ai parlé au début de ma déconfiture, se borne à décrire et analyser, non sans véhémence, la catastrophe française, qui recoupe bien entendu notre catastrophe individuelle. L’écart entre notre volonté et notre capacité d’action, le gouffre entre nos intentions et nos accomplissements, l’infini qui sépare nos vœux de nos gestes, tout ceci qui conduit l’humaniste à se découvrir misanthrope, l’idéaliste à se réfugier dans le cynisme, l’écrivain à se suicider, tout ceci ne va pas dans le sens des illuminations intérieures qui auront accompagné l’écriture de cette conférence, bien au contraire. Plus clairement que jamais peut-être, à mesure que j’ai déroulé ces anecdotes, ces pensées, cette myriade d’accidents rhétoriques destinés à donner du sens aux quelques instants que nous aurons passés les uns avec les autres, vous dans un silence qui m’intimide et qui, je l’espère, prendra bientôt fin, nous donc dans une relation inéquitable, moi seul tenant le crachoir alors que rien ne m’y prédispose – mon identité d’écrivain ne légitime en rien la tenue de ce rituel et je suis en temps normal plus enclin à me taire et écouter – vous et moi, donc, comme tenus par un fil invisible, reliés par des livres, un continuum effarant de livres depuis la nuit des temps, habitant le même territoire de la lecture, à mesure donc que j’ai formalisé ce que la seule contingence d’un temps obstinément dévolu à l’écriture permet, assemblant un propos qui aurait pu ne pas être mais qui, c’est une grâce et c’est celle de la littérature puisque c’est elle qui nous réunit, est et sera tout au moins pour vous et pour moi, il m’est apparu – il m’apparaît, ce présent-là est juste et doit me servir à révoquer les effets de la grandiloquence – il m’apparaît que tout ceci n’aura servi qu’à vous dire, au fond, qu’il n’y a pas d’un côté une vie dite « vraie », celle d’une activité sociale et salariée, une vie intégrée, cosmopolite et visible, une vie ancrée dans le réel parce qu’aux prises avec lui, une vie collective en somme – vie de la conférence – et de l’autre une vie recluse, solitaire, invisible et repliée, vie perchée, vie déconnectée du réel – vie de celle ou celui qui écrit, s’attachant à sa table de travail, dans le silence de journées parfois passées sans parler, sans aucune interaction sociale, sans voir quiconque, vie qui ne serait donc pas « vraie ». Pour chacun, il n’y a qu’une seule vie pleine et définitive – tant qu’à faire, autant terminer par un adage proustien puisqu’après tout il a voulu raconter la naissance d’une vocation quand j’ai voulu raconter celle d’une conférence, chacun fait à la hauteur de ses moyens – une seule vie qui vaut la peine qu’on en rende compte, quelle que soit la manière que l’on peut avoir de l’emplir et de l’animer et dans laquelle pour reprendre une expression proustienne, « brillent tour à tour le mensonge et la vérité » : c’est celle que l’on mène – et comment ne nous paraîtrait-elle pas réelle, comment ne nous paraîtrait-elle pas vraie ? C’est d’ailleurs peut-être la seule demande qu’il faut adresser à la littérature : nous rendre la vie vraie. Pour ma part, la vie dont j’ai imparfaitement tenté de rendre compte ici, c’est la vie de l’écriture, celle qui court après la littérature, celle que je commence et tente de vivre, celle que j’espère mener jusqu’à son terme lointain, celle, enfin, que, pour moi-même, je crois vraie.
Guillaume Poix
[1] Mon deuxième roman a depuis été publié (Là d’où je viens a disparu, Verticales, 2020).
Pour citer ce texte : Guillaume Poix, « Circonstances aggravantes », Literature.green, Décembre 2020, URL: https://www.literature.green/circonstances-aggravantes-poix, page consultée le [date]