Words from the writers
LA SÉLECTION 2020 DU PRIX DU ROMAN D’ÉCOLOGIE (3). Un paysage aride et l'(im)puissance des mots. Entretien avec Thomas Giraud autour du « Bruit des tuiles »
« Je crois assez peu en la différence entre les faits et la fiction. Tout dépend bien entendu de ce que l’on appelle faits, mais la plupart du temps, même s’il faudrait évidemment un peu nuancer les choses, il n’existe pas de faits bruts et dès le premier mot dit, les premières phrases prononcées par quelqu’un pour parler de ces faits, une part de fiction entre en jeu. »
LA SÉLECTION 2020 DU PRIX DU ROMAN D’ÉCOLOGIE (2). À l’affût des cerfs et des mots. Entretien avec Claudie Hunzinger autour des « Grands cerfs »
« La fiction rassemble, convoque, révèle la réalité. C’est une forme puissante. Libre. Je pratique plutôt le conte, ou le rêve éveillé, liant mon imaginaire à l’expérience vécue. J’ai besoin de l’expérimentation directe, du corps à corps avec le monde, pour en parler. Mais je ne saurais m’y limiter. Il me faut la dimension imaginaire. Sa liberté. Son espace. »
L’exotisme de la proximité : démystifier le quotidien pour dépoussiérer ses racines. Entretien de Blaise Hofmann avec Miruna Craciunescu autour d’ “Estive”
« Les générations conversent, s’héritent, s’émeuvent, c’est cela la tradition. Et c’est pour cette raison qu’il est fondamental de ne pas la laisser aux politiciens nationalistes et populistes. »
Concilier littérature et technologie : écrire internet sous le joug de la question écologique. Entretien d’Aude Seigne avec Bouchra Sadqi
“[il s’agit de] réconcilier science et littérature, qui ont tendance à se snober depuis la séparation des savoirs au XIXe siècle. D’un point de vue stylistique, cela passe, je crois, par une sorte d’effort pour détacher le regard sur un objet de ce que cet objet implique, c’est-à-dire de son usage, sa provenance, des récits qui y sont généralement associés. Il s’agit encore une fois d’une forme de d’émancipation ou de résistance.”
Du marché Jean-Talon au littoral groenlandais : réflexions sur le paysage intérieur. Entretien d’Anne-Sophie Subilia avec Miruna Craciunescu
« C’est l’humain qui forge et anime le paysage. Ce dernier, fait de montagnes, de roches et de lumières, […] s’insinue dans chaque intimité et provoque quantité d’impressions, de souvenir, de projections. »
L’environnement de la modernité. Entretien de Jérôme Meizoz avec Riccardo Barontini autour d’”Absolument Modernes!” et de “Haut Val des Loups”
“Il est certain que la «nature» suisse depuis le XIXe siècle est devenue la belle façade du tourisme et des affaires, destinée à poétiser les choix d’une oligarchie au pouvoir […]. Avec tout cela, on ne connaît pas grand-chose de la Suisse industrielle, discrète comme le Capital.”
Remonter le courant : l’écriture de la nature pour interroger le passé. Entretien de Miruna Craciunescu avec Éric Plamondon autour de «Taqawan»
« La figure du saumon dépasse vite son simple rapport à la pêche pour devenir un élément de savoir sur le monde. Il permet de convoquer des éléments historiques, scientifiques, économiques, sociologiques, environnementaux, dans un désir de totalité des angles d’approche d’un même sujet.»
Jardins et relations de proximité. Entretien de Roland Buti avec Claire Jaquier, autour de “Grand National” et du “Milieu de l’horizon”
« J’ai été séduit par cette idée d’une acclimatation de légumes de tous les pays dans un petit espace et par celle de l’harmonie intérieure d’une “république potagère” qui fonctionne parce que les règles sont peu nombreuses, mais claires. »
Humour, Grief, and Species Aloneness in Times of Mass Extinction. An Exchange Between Ida Olsen and Lydia Millet, Author of How the Dead Dream
“[T]o write fiction about dire, massive, looming manmade threats to life on earth isn’t as straightforward as writing about business-as-usual politics or doing satire.[…] There’s a thin, wobbly tightrope you have to walk. Suspended between the neutral, cold descriptiveness some writers preach as necessary to aesthetic rigor and the squishy, on-the-nose earnestness that makes activist fiction mediocre or flat-out bad. You have to find a way to situate your perspective in the habitable zone between austerity and mawkishness”.
La violence du corps : la nature à l’épreuve des sens. Entretien d’Audrée Wilhelmy avec Miruna Craciunescu
“Les personnages évoluent dans une société sans histoire, sans culture, sans loi, sans commerce, sans codes et sans institutions. Dans ce monde-là, les relations entre les personnages sont au plus près des rapports de force primitif, qui fait écho à celui des bêtes.”
Cultiver la convergence. Entretien d’André Bucher avec Davide Vago
“Il semble urgent d’autres récits et représentations du monde, d’autres interactions en redistribuant les rôles entre les êtres et leur milieu. C’est l’enjeu du vingt et unième siècle, la littérature doit selon moi y prendre part, tout en gardant à l’esprit que ces mêmes interactions peuvent conduire à l’affrontement.”
Pour une poétique écologique de la ville. Entretien de Ahmed Mahfoudh avec Thabette Ouali autour des “Jalousies de la rue Andalouse”
“Je dénonce la dégradation architecturale provoquée par le mauvais goût, au nom de l’intérêt matériel, et j’essaie de montrer le passé de ma ville, non d’un point de vue nostalgique et idyllique, mais le passé comme leçon au présent pour édifier la ville future. […] Le combat de la littérature tunisienne en faveur de l’environnement est une lutte pour la survie de la diversité culturelle.”
Écrire le vivant : l’imagination au défi de la science. Entretien de Christine Van Acker avec Riccardo Barontini autour de “La bête a bon dos”
Au lieu de scier la branche sur laquelle nous vivons tous, il serait plus sensé de descendre de l’arbre au sommet duquel une certaine idée de l’évolution nous a maintenus pour aller palper la circulation de nos racines, à tous, animaux et végétaux. Il y a longtemps que les scientifiques ont abattu cet arbre. Quand on regarde le buisson du vivant, nous nous trouvons au bout de l’une de ses petites branches ; les autres sont occupées par des organismes invisibles à l’œil nu.
Nuove geografie letterarie: Il camminare come atto di resistenza ecologica. Irene Cecchini dialoga con Wu Ming 2
“La conoscenza del territorio è la conoscenza delle sue forme di vita, dei suoi fili, dei suoi movimenti, che sola può permetterci di abitarlo rispettandoli, dialogando, adattando la nostra presenza a quel che già c’è, per non correre il rischio di fare il contrario: adattare l’altro a quel che noi siamo, impedendogli di essere altro”.
La Malchimie : De la littérature pour traiter la terre. Entretien de Gisèle Bienne avec Pierre Schoentjes
« Les « poisons » contenus dans les pesticides de Bayer, Syngenta et Monsanto ont donc, pendant plusieurs décennies, agi lentement, sournoisement, sur l’organisme des hommes. Plus rapidement sur celui des insectes et des petits mammifères qui vont disparaître de ces terrains d’action puis de l’environnement. La pollution touche la terre, l’eau, l’air, le vivant. C’est d’une tristesse infinie. »
Feminizing Wilderness Writing in the Anthropocene. An Exchange between Ida Olsen and Abi Andrews, Author of “The Word for Woman is Wilderness” (2018)
“There is still a dichotomy of human vs nature within ‘nature writing’, and writers that write about ‘nature’ are still largely male, white, middle class writers with specialist ‘naturalist’ knowledge. I don’t think we have time in our rapidly simplifying life-web to think that everything other than human is the domain of only ‘nature writers’ and their readers. Every writer is a nature writer now”
“Maldifiume”: Responsabilità narrativa e resistenza liquida. Irene Cecchini dialoga con Simona Baldanzi
“Potrai fare a meno di certi arti, ma le amputazioni hanno dei rischi e comunque nel territorio non può succedere: è molto più collegato del nostro corpo”.
La littérature au service de l’animalisme, l’animalisme au service de la littérature. Échange entre Camille Brunel et Hannah Cornelus autour de “La Guérilla des animaux”
“Je n’aime pas l’idée d’une littérature qui se contente de divertir, probablement parce que c’est une posture que je trouve un peu hypocrite dans la mesure où on n’échappe jamais à sa petite propagande, même si on n’écrit que des haïkus […] l’animalisme est d’ores et déjà saturé de textes militants, tandis que la littérature est beaucoup plus timorée – peut-être parce que les écrivains ont tendance à revendiquer une forme d’apolitisme, par honnêteté ou par crainte de passer pour des idéologues.”